n°43-44 – 2012 – 03

Les Banquiers centraux européens, acteurs centraux de la « révolutions néolibérale »

Frédéric Lebaron

A partir du premier semestre 2012, les discours économiques publics apparaissent de plus en plus contradictoires en Europe : alors que certains commentateurs (par exemple les journalistes du Financial Times ou, plus encore, nombre d’économistes nord-américains) dénoncent de plus en plus ouvertement l’effet récessif durable des politiques d’austérité et réclament une politique « de croissance » qui ne se réduirait pas aux seules « réformes structurelles », d’autres acteurs, en premier lieu gouvernementaux, continuent quant à eux d’insister sur l’urgence d’un rééquilibrage à court-terme des comptes publics et sur la nécessité impérative de libéralisation des économies européennes.
Dans cette lutte symbolique de plus en plus aigüe tout au long de l’année 2012, qui traverse simultanément le champ politique, économique et l’univers académique, les dirigeants de la Banque centrale européenne occupent une position clé : depuis 2009, sous l’impulsion notamment des banquiers centraux allemands (comme le membre du directoire Jürgen Stark qui finira par quitter ses fonctions devant l’ampleur de ses désaccords avec l’institution) révulsés par le basculement des politiques monétaires dans des stratégies dites « non conventionnelles » (notamment le rachat de titres de la dette publique grecque puis des pays périphériques) et par la fragilisation de la zone euro induite par la crise de la dette, ils sont aux avant-postes dans la revendication d’une politique d’ajustement structurel qui peut seule, selon eux, permettre à l’euro de rester une monnaie solide, suscitant la confiance des acteurs économiques.
Le rôle des banquiers centraux européens dans l’imposition des politiques d’austérité et de réformes structurelles fait d’eux les acteurs de premier plan de cette « révolution néolibérale », née dans les années 1970-80, qui semble par ailleurs s’essouffler dans la plupart des pays du monde sous l’effet de la crise financière et de la remise en cause des dégâts de la mondialisation.

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